Quand jeudi matin, après seulement deux heures de comatage, j'ai finalement accepté le fait que c'était pas à six heures du mat' que j'allais commencer ma nuit. Jones était partie au boulot (je l'aurais bien accompagnée tout compte fait), le jour commençait à se lever, il faisait beau, je n'avais personne avec qui parler, il fallait que j'attende patiemment jusqu'à dix heures. Le tic tac des horloges étaient synchro avec les bulles émises par le génial poisson de Jones. J'ai fait chauffer le thé, nourri mon poteau (il ressemble, pour ma plus grande joie, de plus en plus à Cléo, le poisson rouge femelle de Pinochio) n'ayant rien de mieux à faire à cette heure ci, j'ai allumé la téloche.
En buvant thé sur thé, j'ai regardé pleins de dessins animés dont La Panthère Rose. Elle est marrante cette panthère, mais la petite musique caractéristique qui tourne en boucle au long des épisodes, c'est à la longue, juste énervant. J'ai zappé de chaînes en chaînes et me suis envoyé tous les reportages d'Arte jusqu'à 10 heures du mat' en fumant roulée sur roulée (un reportage sur La Valette, capitale européenne de 2018 où un architecte a la lourde mission de créer du neuf en préservant cette cité médiévale parfaitement conservée ; une rediff d'un reportage sur Giles Duley qui suivait les soldats américains en Afghanistan et qui a perdu un bras et ses jambes à cause d'une mine antipersonnel et qui maintenant, photographie les afghans qui ont connu le même sort, femmes, enfants, hommes* ; un reportage sur le monde d'aujourd'hui où en résumé, c'est la merde ; un reportage sur une chanteuse d'opéra autrichienne dont le métier la rend, je cite, "très heureuse" ; un reportage sur des transsexuels du troisième âge qui racontent comment leurs familles et la société les ont mis à l'écart et j'en passe...) en alternant toutefois, grosse erreur, avec Télématin.
Et là, à part les nappes phréatiques françaises bien remplies (finalement, c'est plutôt une bonne nouvelle non?), l'info capitale du jour c'était les chiffres du chômage du mois de mars. Pour en parler, alors même qu'ils n'étaient pas encore sortis, Najat Vallaud Belkacem. Fatiguée, un chat dans la gorge, mais souriante de temps en temps. Le journaliste, en chasseur de scoop qu'il est, voulait absolument savoir si le record de 1997 allait être battu ! La porte parole du gouvernement, visiblement agacée, s'efforçait d'expliquer que là n'était pas l'important. Et comme je suis d'accord.
L'important, c'est que beaucoup de personnes sont dans la merde jusqu'au cou. L'important c'est comment on va faire pour sortir de ce bourbier? L'important c'est comment des parents vont nourrir leurs enfants, l'important c'est que même si les temps sont durs, il n'y a qu'à serrer les fesses et attendre que ça passe. Bien sûr que c'est grave, bien sûr qu'on a pas fini d'en baver. Bien sûr qu'aux vues des scandales politiques qui ne font qu'éclater, beaucoup vont choisir la voie de l'abstention et sûrement que beaucoup de jeunes électeurs vont se désintéresser de la politique qui bien évidemment est corrompue. Bien sûr que c'est inquiétant, bien sûr que les journaux ont raison de faire le lien de la situation actuelle avec la crise des années 30, bien sûr que l'ordure de fille Lepen n'a même pas besoin de parler pour que certains se rallient à elle et qu'aux municipales de 2014, elle risque de rafler des voies en masse, bien sûr qu'en 2017 on va tous avoir une grosse frayeur. Mais, comme dans Game of Thrones, le combat ne fait que commencer. Nous autres français, comme nous aimons toujours nous plaindre (il fait beau? Ça ne durera pas-il fait trop chaud-on va choper des coups de soleil. Il pleut? Putain mais il fait pas beau-mais pourquoi en avril c'est pas la canicule?- Mais merde on voulait déjà sortir les maillots de bain!), je crois qu'il serait grand temps de revoir nos priorités, et surtout, ne pas baisser les bras alors que ce n'est que le commencement.
Pour en revenir aux chiffres du chômage, bien sûr qu'ils sont mauvais et je pense beaucoup à toutes les familles dont l'angoisse n'a pas fini de croître. Je m'estime donc plutôt chanceuse car comme beaucoup de jeunes et de moins jeunes, j'ai dû retourner vivre chez mes parents. Au moins, j'ai très peu de charges et à part mon chat, je n'ai personne sur qui veiller. Bon si, je veille sur mes proches mais je ne les nourris pas moi même ! En ayant fait un saut à mon agence pôle emploi (celle d'Arc-Les-Gray- 7.0 represents !), beaucoup plus petite que celle dont je dépendais à Lyon, j'ai constaté qu'il y avait moins de misère humaine que là bas. Mais quand même. Je patientais derrière une dame d'une soixantaine d'années, et forcément, mon petit coeur s'est serré d'un cran quand elle expliquait son cas à la dame de l'accueil (il va falloir, à un moment, que je m'endurcisse**). D'ailleurs, le personnel du pôle emploi d'Arc est tellement gentil que quand le monsieur a résolu mon cas en cinq minutes, j'avais envie de pleurer de soulagement, de me mettre à ses pieds telle une nonne bouddhiste devant Bouddha, lui faire des offrandes, lui ériger un autel personnel, lui... Je m'emballe mais dans ma tête, c'était presque ça ! Dans la poignée de mains d'au-revoir, j'y ai mis toute ma gratitude et l'ai remercié au moins cinq fois.
* L'Afghanistan, est depuis mon enfance, un sujet qui me passionne. Au collège, je voulais devenir professeur pour partir enseigner là bas aux fillettes Afghanes. Au lycée, je ne savais plus du tout ce que je voulais faire. Pendant mes études de photo, en cours d'histoire de la photo, quand on a traité du photojournalisme et qu'on a fini par avoir une masterclass avec Anne Holmes, l'idée s'est insidieusement ramenée dans ma tête. Seulement, avec tout les photographes internationaux qui tombent comme des mouches, je pense que je ne tiendrais pas deux minutes. Psychologiquement surtout.
** Il faut que je m'endurcisse vraiment. Fin mars, à Paris avec les copines, on se promenait en plein Saint Germain des prés. Et là, à côté d'un feu rouge, une famille entière avec leurs effets personnels. J'ai ordonné aux filles de m'emmener ailleurs avant que je leur donne tout ce que j'avais sur moi (c'est à dire presque rien, ça se saurait si j'étais riche), vêtements compris et ne finisse par pleurer de rage, de tristesse, de compassion devant tant d'injuste abomination.
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